Des plantations encadrées
Concernant l'aspect matériel des choses, les jardiniers parisiens peuvent recevoir de la terre, des graines et même suivre des cours de jardinage s'ils le souhaitent, à la maison du jardinage à Bercy ; ce projet s'inscrivant dans une démarche participative, où chacun devient acteur et responsable de l'environnement dans lequel il vit. Ce permis de végétaliser n'est pas sans rappeler le mouvement originaire d'Angleterre les Incroyables comestibles, consistant à végétaliser les espaces urbains en plantant en ville légumes, fruits et fleurs, mais aussi à nourrir les citadins en laissant les récoltes à disposition. Contrairement à ce mouvement, la particularité du permis de végétaliser repose sur le fait que les plantations et l'intervention des jardiniers sont encadrées par la municipalité, qui met à disposition des bacs à cultiver, des parterres ou des endroits spécifiques (au pieds d'arbres par exemple). Et puisque les plantations sont une chose dans le jardinage mais qu'il convient également de les entretenir, les villes proposent généralement aux demandeurs des lieux de plantation situés à proximité de leur domicile ou de leur lieu de travail, cela dans le but de leur offrir des conditions optimales d'entretien de leur jardin urbain. Si le principe reste le même en substance, à savoir végétaliser les rues et cultiver fleurs, fruits et légumes à partager, chaque ville concernée est libre d'adapter son cahier des charges à sa politique environnementale ainsi qu'à d'autres paramètres, à l'image de la région et du climat par exemple.
Focus sur Bordeaux
La démarche de Bordeaux en matière de végétalisation des rues repose sur plusieurs éléments, à commencer par une volonté de développer les espaces naturels en ville, favoriser la biodiversité mais aussi contribuer à l'amélioration du cadre de vie des bordelais tout en encourageant les habitants à échanger entre eux et à créer du lien. Pour y parvenir, la capitale girondine a mis en place le permis de végétaliser, permettant ainsi aux bordelais d'investir leur rue afin de l'embellir en plantant des fleurs, des plantes et autres végétaux. Il suffit pour cela, dans un premier temps, d'effectuer la demande de végétalisation en ligne ou en se rendant dans sa mairie de quartier. La demande est ensuite étudiée, notamment en termes de faisabilité technique liée par exemple à la présence de réseaux. Lorsque le projet est validé, la municipalité procède à la réalisation d'une fosse de plantation et fournit au jardinier de la terre végétale, voire si besoin des semis et des plants parmi lesquels du jasmin étoilé, du chèvrefeuille, des clématites ou encore des passiflores ou roses trémières. Il est par ailleurs à noter que la ville n'intervient que deux fois par an pour creuser les fosses de plantation, aux mois de mars et octobre. Ce qui implique un peu d'anticipation de la part des demandeurs. D'autre part, la ville a mis en place une charte de végétalisation interdisant notamment certaines espèces ou variétés végétales, à l'image des plantes envahissantes, urticantes ou épineuses, affichant également une préférence pour les plantes robustes aux besoins en eau modérés. Enfin, comme c'est aussi le cas pour les autres villes délivrant le permis de végétaliser, les jardiniers bordelais sont invités à entretenir leurs fosses et leurs plants en désherbant de façon naturelle, en veillant à tailler pour contenir la végétation et à nettoyer les trottoirs, à défaut de quoi la ville s'octroie le droit de retirer le permis accordé. Victime de son succès, ce mouvement de végétalisation urbain témoigne d'un fort intérêt des citadins pour un retour à la terre et à l'authenticité, tant par le geste de planter et de mettre les mains dans la terre que par le fait de récolter ses propres légumes et fruits. Mais ces initiatives soulignent aussi la dimension solidaire du jardinage, que l'on retrouve ici dans l'entraide qui peut se mettre en place entre voisins et dans le partage des récoltes. Sans oublier le désir de plus en plus affirmé de contribuer, chacun à son niveau, à la préservation de l'environnement. Un besoin de nature symptomatique dans les grandes villes, où les français sont de plus en plus nombreux à éprouver un sentiment de rejet et l'envie de se mettre au vert et au calme en s'exilant vers des agglomérations à taille humaine.